dimanche, février 16, 2025

Cinéclub - Douze hommes en colère

Encore un classique à rattraper, encore une belle expérience. Voilà un très beau film, très académique en un sens avec son unité de lieu, de temps et d'action, et en même temps du très beau cinéma et un message qui fait du bien en ces temps troublés. L'histoire, on la connaît : douze jurés se retrouvent dans une pièce pour prendre une décision à l'unanimité sur un parricide où l'affaire semble complètement claire et le suspect clairement coupable. Pourtant, parmis les jurés, un homme croit, non pas à l'innocence, mais au doute raisonable. Petit à petit, il arrive à convaincre les autres jurés que l'affaire n'est pas si claire, et l'acquitement est prononcé.

Ce qui rend ce film très fort, c'est la démonstration de l'intelligence des foules : ces jurés viennent de différents milieux, ont des âges différents, et chacun apporte un éclairage différent sur la situation, et c'est ensemble qu'ils finissent par se mettre d'accord. Ainsi, le vieux juré comprend les motivations et les biais des témoins eux-mêmes âgés, le juré qui vient d'un milieu misérable et violent permet de décortiquer le coup de couteau, le banquier timide évoque les menaces proférées sans y croire, et le juré étranger naturalisé respecte plus la démocratie et le droit que certains jurés "de souche".

C'est un film météorologique, aussi - On transpire avec eux, on frissonne avec eux quand l'averse finit par tomber - L'atmosphère, étouffante, finit par s'éclaircir lorsque le doute finit par triompher.

dimanche, février 09, 2025

Cinéclub - Whiplash

Whiplash est l'histoire d'un jeune batteur de jazz très ambitieux, aux prises avec un chef d'orchestre tyrannique. Le film soulève la question de la recherche de perfection, et des moyens utilisés pour y parvenir. C'est en étant abusif et brutal que le chef d'orchestre espère (du moins le prétend-il) découvrir, ou même créer, le prochain génie du Jazz, avec en filigrane l'histoire vraie de Charlie Parker qui avait raté un solo pris beaucoup trop vite et avait du quitter la scène, humilié, pour s'entraîner seul pendant un an et revenir transformé.

L'on passera quelques invraisemblances (les blessures à la main du batteur, la vengeance complètement hors sol du chef d'orchestre). Il y a peut-être aussi une petite facilité scénaristique qui consiste à se focaliser uniquement sur l'enjeu d'une tenue d'un tempo endiablé, en laissant de côté d'autres aspects techniques du métier de batteur. Le but du héros d'être le meilleur batteur du monde semble également en décalage, on ne le voit pas apprécier particulièrement la musique, et son intérêt semble porter uniquement sur la performance technique et athlétique.

Mais en revanche, quelle maîtrise dans la mise en scène et le montage ! Pas étonnant qu'il ait reçu tout un tas de récompenses dans la catégorie. La scène de début, quand le héros s'entraîne seul, et que le chef d'orchestre entre dans la salle de répétition, est saisissante : la caméra est en vue subjective du point de vue du chef d'orchestre, et le héros semble tout d'un coup nous remarquer, lever la tête, s'arrêter, et s'excuser. La scène de l'accident de voiture est également une séquence choc, c'est le cas de le dire, et m'a fait sacrément sursauter. Enfin, la dernière scène est magnifique, avec des mouvements et des placements de caméra tout à fait remarquables, et qui accompagnent la musique au plus près. Cela rend les scènes de musique incroyablement dynamiques, au point qu'on en oublie de respirer.

Il y a également une manière plutôt différente de filmer la musique : là où beaucoup de films proposent une vision romantique du musicien en extase et ne faisant qu'un avec son instrument, on voit ici toute la difficulté du travail de répétition, de l'angoisse et du stress, de la compétition féroce entre musiciens.

Et c'est finalement la grande question du film : est-ce que la fin justifie les moyens ? Est-ce qu'un professeur peut tout se permettre si cela transcende l'élève et lui permet de se dépasser, et tant pis pour les pots cassés et ceux qui n'ont pas pu suivre et qui sont détruits ? À cette question, le film semble finir par répondre oui, ce qui me met mal à l'aise : je reste convaincu que des génies peuvent émerger d'un enseignement respectueux et attentif. Et si l'on rate un ou deux génies parce que l'on a pas voulu tout sacrifier, peut-être est-ce mieux ainsi.

dimanche, février 02, 2025

Le brookie

On fait dans le pas léger avec ce "brookie", qui est donc un mélange de brownie et de cookie. L'idée, c'est de faire un brownie, et d'y déposer, dessus, et aussi pourquoi pas dedans, des morceaux de pâte à cookie. C'est évidemment plutôt lourdingue, et au final, même si ce n'est évidemment pas mauvais, la partie cookie n'apporte pas grand chose : finalement, autant manger, séparément, des brownies et des cookies plutôt que de tenter de les marier contre leur gré.

Juste une jolie photo

mardi, janvier 21, 2025

Cinéclub - Lawrence d'Arabie

Voici un film que j'avais envie de voir depuis longtemps ! Classique parmis les classiques, l'histoire de Lawrence d'Arabie, controversé officier de l'armée britannique qui a aidé les tribus arabes à s'unir durant la première guerre mondiale. Complètement mégalo et persuadé d'être un nouveau prophète, il permettra d'importantes conquêtes militaires contre les turcs.

C'est un film épique dans tous les sens du terme. Très long (plus de 3 heures), présentant de formidables paysages désertiques et de grandes scènes de bataille, autant que les tourments de son personnage principal, à la fois séduit et dégoûté par les horreurs de la guerre, et à l'équilibre mental parfois perturbé. J'ai surtout apprécié ces grandes cavalcades à dos de chameau dans ces paysages de roc et de sable, ainsi que ces histoires d'amitiés viriles (très viriles - il n'y a pas une seule femme au générique !) entre ces cultures si différentes. Le film contient plein de bonnes idées de réalisation - Une qui m'a particulièrement marquée est la direction des expéditions et des batailles : toujours de gauche à droite. Et à la fin, quand Lawrence prend enfin le chemin du retour, pour la première fois, on le voit passer de droite à gauche...

Il me reste encore quelques classiques à explorer. Peut-être "12 hommes en colère"?

dimanche, janvier 05, 2025

Bonne année !

Bonne année à tous ! Au menu de cette année, plus de photos de trucs à manger, des fiches de lecture, et des fiches cinoche !

mardi, octobre 08, 2024

Fiche de lecture - Casca la couronnée

Je crois que c'est dans le Canard Enchaîné que j'ai lu la critique de cet étrange objet littéraire, et je me suis dépêché d'acquérir l'ouvrage. Ce bouquin fusionne les codes de la fantasy avec ceux de la culture urbaine et des jeux vidéos pour donner une aventure foutraque et bizarroïde émaillé de digressions faussement naïves, le tout dans un têtu présent de l'indicatif. L'on suit donc les aventures de Casca, serveuse dans un golf qui se retrouve à devenir gardienne d'un objet mythique que tentent de s'arracher plusieurs factions plus ou moins amicales. Derrière ce scénario relativement standard, c'est une ode à la culture geek, avec des références continuelles aux Pokemon, aux jeux vidéos, aux Lego, aux grandes marques (ordinateurs, téléphones, voitures...) à la limite du "name dropping". Mais c'est aussi une histoire très drôle, avec des pouvoirs toujours renouvelés des boss que Casca et ses alliés doivent combattre, des petits appartés pince sans rire, et au final un délire généreux et qui ne se prend pas au sérieux.

Une belle lecture donc, aux antipodes d'une "horde du contrevent", mais pas moins plaisante !

dimanche, septembre 29, 2024

Rachmaninov

Je suis allé voir Leif Ove Andsnes jouer le concerto pour piano numéro 3 de Rachmaninov, accompagné par l'orchestre philarmonique de Londres dirigé par Edward Gardner. Performance impressionnante, magnifique salle de concert (Southbank près de Waterloo), et un bel orchestre. C'est quand même un sacré morceau, où on a pas le temps de s'ennuyer (contrairement à la pauvre cymbaliste qui a dû jouer 4 notes sur l'ensemble du concert!), et Andsnes (dont je n'avais jamais entendu parler avant d'ailleurs) y met du coeur.

Installé au premier rang du balcon, on se sentait un peu loin de l'orchestre, mais avec tout de même une vue imprenable. Et l'absence de public juste devant soi est sacrément confortable. Et le tout pour une fraction de ce que coûte une place dans un concert de pop un peu à la mode.

J'étais inquiet que ma fin de bronchite ne gache le concert de tout le monde, j'avais donc préparé ma bouteille d'eau et j'étais prêt à m'auto-externaliser en cas de quinte de toux. Finalement, j'ai toussé discrètement deux ou trois fois, et je ne pense pas avoir été le membre du public le plus disruptif.

Emporté par la magie de la musique, et connaissant bien le morceau par ailleurs, j'ai vraiment vécu chaque note, presque en transe, et dansant dans mon siège au rythme des tensions et des relâchements. C'est quand j'ai regardé autour de moi et que j'ai vu tout le monde absolument immobile que je me suis dit qu'il fallait peut-être me calmer.

Ça devait bien faire une décénie que je n'étais pas allé à un concert de musique classique, cela m'a donné envie de m'y remettre. On gardera un oeil sur le programme.

Fiche de lecture - Cold Comfort Farm par Stella Gibbons - L'humour sur le fil du rasoir

Voilà un bouquin qui m'est tombé dessus complètement à l'improviste - Recommandations croisées d'un collègue, je lui conseillais chaudement de lire "The ascent of the Rum Doodle", et il m'a dirigé vers "Cold Comfort Farm". Ce livre paru en 1932 est une parodie des romans populaires à l'époque mettant en scène une héroine (généralement urbaine et éduquée) qui allait transformer la vie de chacun des membres d'une famille rurale et frustre. Et là, le concept est poussé juste ce qu'il faut pour rendre le bouquin absolument hilarant, mais sans jamais tomber dans la farce.

On croisera donc une galerie de fermiers tous plus bizarres les uns que les autres, mais chacun prêt à exprimer une passion nouvelle, grace à Flora Poste, notre héroine pleine de resources et de certitudes jamais ébranlées. On croisera un prédicateur apocalyptique, une vache qui perd sa patte, un patois inventé pour l'occasion, et l'effrayante tante Ada qui fait un carnage avec son journal "Milk Producer Weekly".

La grande force de ce roman, c'est de rester juste à la limite du délire : avec son ton détaché, ses personnages déjantés mais cohérents, et ses péripéties totalement inattendues, c'est une pépite de pince-sans-rire.